egroupées au sein de l’Alliance France Tourisme (AFT), les entreprises leaders dusecteur du tourisme, bien conscientes de leur responsabilité et du rôle moteurqu’elles assument au sein de celui-ci, ont souhaité formuler des propositions afin decontribuer à la large réflexion sur l’avenir du secteur, notamment dans le cadre duPlan de reconquête et de transformation du tourisme annoncé le 2 juin dernier par lePrésident de la République à Saint-Cirq-Lapopie (Lot).
Le secteur du tourisme, qui représente 8% du PIB et plus de 2 millions d’emplois, peineaujourd’hui à se relever. Si les résultats de l’été sont excellents pour certains, il ne faut pas seleurrer : la situation financière de nombreuses entreprises continue d’êtrepréoccupante. Le surendettement et le déficit en fonds propres de nombre d’entre ellesrisquent en effet de réduire leurs capacités d’investissement. Ceci intervient alors qu’elles sontpar ailleurs confrontées au sujet récurrent de la pénurie de main d’œuvre. Pour l’AFT, dresser lebilan de la situation des entreprises est un préalable nécessaire.
Ainsi, nos propositions se veulent concrètes, évolutives et conçues dans un esprit de concertation renforcée avec les pouvoirs publics. Il s’agit bien sûr d’apporter des réponses immédiates – mais également de saisir l’opportunité d’une crise sans précédent pour se confronter aux difficultés structurelles du secteur en apportant des solutions durables.
Notre objectif est que la France demeure un leader mondial du tourisme, dans un contexte deconcurrence internationale plus exacerbée que jamais, en se dotant des moyens pouraffronter le défi du redressement et de la transformation profonde vers un tourismed’excellence, numérique et responsable.
Pour ce faire, l’Alliance propose d’adopter une stratégie nationale à horizon 10 ans, pilotée etportée par une gouvernance renouvelée, dont l’objet premier sera la structuration de l’offreglobale de services.
Deux freins principaux doivent être soulignés : la crise des ressources humaines et la fragilitéfinancière des entreprises qui les rend vulnérables et restreint leur capacité d’investissement,alors même que les exigences des clientèles sont croissantes.
L’Alliance France Tourisme propose des mesures au bénéfice des acteurséconomiques du secteur, leurs salariés, des territoires et bien sûr les touristes :
5 propositions marquantes en faveur du développement de l’expérience touristiqueet au bénéfice des territoires :
- Développer des parcours s’appuyant sur des thématiques fortes, sur le modèledes « Routes des Vins » en élargissant cette démarche à d’autres thématiquescomme l’Histoire, les Sports extrêmes (sports nautiques dans les outre-mer). Cela pourra dynamiser le tourisme émanant des locaux, encourager la revisite, diffuser les flux entre sites, et contribuer à renforcer les comportements de choix d’un séjour en fonction de l’expérience que l’on y vit plutôt que de site « à faire ».
- En matière de transports, renforcer l’accessibilité « point à point », notammentsur les « derniers kilomètres » et le transport sur place, et ce y compris en dehorsdes grandes métropoles, à travers un maillage plus fin, moins carboné et plus fréquent d’offre de transports régionaux et locaux, avec notamment la mise en service opérationnel du CDG Express au plus tôt.
- Soutenir le retour des jeunes générations sur les territoires touristiques tricolores :
a. Dédier des enveloppes allouées aux voyages scolaires et classes de neigedans le budget de l’Éducation nationale.
b. Proposer, dès la saison hivernale 2021-2022 et pour toute la saison de ski,aux jeunes âgés de 10-13 ans un "Passeport des Neiges", sur le modèle de cequi se pratique avec succès au Canada. Ce pass leur permet de skier à titregracieux sur un certain nombre de domaines skiables participants et debénéficier de prix d’hébergement avantageux à la fois pour eux et leursaccompagnateurs.
- Amplifier la diffusion des « chèques vacances » :
a. Par les entreprises à leurs salariés au même titre que la prime défiscalisée, enharmonisant le régime d’exonération sociale applicable à tous les clients del’ANCV, quelle que soit la taille de l’entreprise
b. En repensant la gouvernance de la distribution des chèques vacances pouramplifier leur diffusion et assurer le financement des politiques sociales sansdépendre d’une dotation budgétaire de l’État et donc scinder l’activité de l’ANCVen une composante sociale, relative aux politiques sociales, et une composantecommerciale qui serait la diffusion des chèque vacances.
c. Soutenir le programme Séniors en vacances de l’ANCV : élargir le tour de tabledes financeurs en y impliquant les mutuelles et les acteurs du monde del’autonomie et de la dépendance
- Favoriser la création de pôles de compétitivité touristiques. Sur les territoires, favoriser les pôles de compétitivité afin d’y favoriser l’innovation, développer l’entreprenariat et fédérer les écosystèmes, créer des emplois et générer la croissance.
5 propositions marquantes au bénéfice des entreprises et des salariés du secteurtouristique français :
- Relever le défi de la crise des ressources humaines en finançant l’emploi via l’entreprise et non plus les dispositifs de chômage ou de chômage partiel en instaurant une réduction des charges salariales proportionnelle et progressive selon l’accroissement de la masse salariale (en nombre de salariés et non au sens budgétaire). Une solution qui financerait les nouveaux recrutements et pourrait favoriser une réponseà la demande de flexibilité des salariés qui ne souhaiteraient plus travailler en coupure. Par ailleurs, mettre entre parenthèses les règles de droit social relatives aux PSE obligeant les entreprises à observer un délai d’un an pour réembaucher au même poste, alors que la reprise est plus rapide que prévue et que le besoin en personnel en ETP est croissant.
- Faire en sorte que la France soit une nation qui forme à des métiers plutôt qu’une nation qui délivre des diplômes, en créant notamment un réseau d’instituts de formation et/ ou d’écoles spécialisées présents dans chaque grande destination française qui permettrait de mettre en valeur les secteurs d’excellence à la française (hospitalité, luxe, etc.), en y associant les entreprises pour identifier précisément les besoins et développer l’apprentissage et l’acquisition de compétences et en développant la logique des « passerelles » en inter métiers et inter filières, dans le cadre de la formation continue et des plans de carrières.
- Répondre aux enjeux spécifiques des saisonniers et apporter des solutions à la vie professionnelles quotidienne des saisonniers :
a. Créer un « Pass Saisonnier de Retour à l’Emploi » qui comprendrait pour lestravailleurs saisonniers le remboursement des frais de déplacement aller-retour(élargissant aux saisonniers le dispositif d’aide à la mobilité de Pôle Emploi), uneparticipation au logement saisonnier et une semaine de formation. Cettemesure pourrait être financée par l'économie de versement de l'AllocationRetour à l'Emploi (ARE).
b. Pour améliorer les conditions de logement des employés saisonniers, dont lesmoyens sont souvent modestes et qui doivent faire face à la forte pressionexercée sur le marché immobilier local, autoriser les professionnels du tourismeà dégrever de leur contribution au 1% Logement les investissements alloués àla rénovation, réhabilitation et à l’amélioration des conditions de logement desemployés saisonniers.
- Réguler les relations entre les acteurs, notamment les GAFAM :
a. Renforcer juridiquement l’encadrement de la relation avec les OTA afin que lescommissions qui leur sont versées ne puissent s’appliquer qu’aux prix en HTencaissés par les hébergeurs et les restaurateurs, et non pas aux prix TTC.
b. Plus généralement, adapter les règles régissant les relations entre leshébergeurs français et internationaux présents sur le territoire français et lesOTAs, en renforçant juridiquement l’encadrement des pratiques desplateformes.
Adapter les règles concernant les entreprises du numérique touristique afin de permettre l’émergence d’acteurs français. Les contraintes réglementaires et fiscales auxquelles les acteurs touristiques français du numérique sont soumis peuvent les mettre en difficulté face aux GAFAM qui ne sont pas.
- Simplifier réellement les démarches administratives et la lisibilité des offres de tourisme en France :
a. La nécessaire création d’un guichet unique des services de l’État pour lesprofessionnels du tourisme. Placé sous l’autorité directe du préfet dedépartement, ce guichet unique pourrait se traduire par un interlocuteur uniqueau sein des directions départementales de l’emploi, du travail et des solidarités(DDETS), chargé d’animer un réseau de référents dans l’ensemble des servicesde l’État (DDT, DGFIP, Ademe, etc), la crise ayant révélé la complexité à dialogueravec différents interlocuteurs.
b. Clarifier pour rendre plus lisibles et plus fiables, les labels et classifications dutourisme et leur attribution. Depuis les années 1990, au sein de l’industrie dutourisme prolifèrent un grand nombre de labels, classifications, prix, agréments,sigles qui égarent les entreprises, les collectivités territoriales, et finalementles clients.
Enfin concernant le « surtourisme », les entreprises de l’AFT ont une vision trèsclaire des solutions à déployer :
Il n’y a aucune fatalité en la matière mais à la condition que l’ensemble des acteurs de la filière, et au premier chef les entreprises, se mobilisent pour endiguer ce risque là où il peut apparaître. Cela nécessite entre autres :
- Une meilleure répartition de l’offre dans l’espace et dans le temps,
- La valorisation de nouveaux sites,
- La multiplication des parcours clients, des activités touristiques qui s’intègrent mieux dans les territoires concernés
- Une valorisation du cadre de vie et du milieu naturel
- Une création de vraie « richesse » pour les habitants des zones concernées.
En effet, les entreprises de l’AFT souhaitent le développement de nouveaux sites touristiqueshomogènes avec notamment un positionnement territorial qui permettront de renforcerl’attractivité touristique et le rayonnement d’une destination tout désengorgeant les sites devisite majeurs existants et d’assurer une meilleure diffusion du tourisme sur l’ensembledu territoire national. Il s’agit donc d’une réponse positive pour réduire les problématiques desur-fréquentation qui affectent certains sites majeurs, tout en soutenant durablement lesécosystèmes touristiques et économiques locaux. Cela implique que les entreprises innoventet sortent des sentiers battus (exemple : gestion des hébergements, diversification des offres,promotion, etc), et bien sûr que les différents échelons territoriaux, en bonne articulation avecces dernières, favorisent et accompagnent ces évolutions.